Force majeure : critères et effets en droit des contrats

Force majeure : critères et effets en droit des contrats

Force majeure droit des contrats

Concept juridique à la notoriété dépassant largement le cercle restreint des juristes, la force majeure tire sa popularité des effets puissants qui lui sont attachés. Si à l’impossible nul n’est tenu, le débiteur entend bien recourir à cette voie lorsque la situation échappe à sa maîtrise.

Dans cet article, découvrons quels sont les cas de force majeure, par qui ils peuvent être soulevés et dans quel but.

C’est parti ! 🚀

Sommaire

1. Force majeure : définition

 
Qu’est-ce que la force majeure ? 💥

En matière contractuelle, la force majeure est définie à l’article 1218 du Code civil comme « un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, qui empêche l’exécution de son obligation par le débiteur ».

Autrement dit, la notion de force majeure correspond à un évènement imprévisibleirrésistible et extérieur qui empêche le débiteur de mener à bien l’exécution de ses obligations stipulées au sein d’un contrat synallagmatique ou unilatéral.

2. Les critères de la force majeure

 
Quels sont les critères de la force majeure ? 🧐

 

Un évènement imprévisible

 
« Un évènement qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat ».

Premier critère de la force majeure, l’imprévisibilité s’apprécie in abstracto, en référence à un débiteur avisé, prudent et diligent et en considération des circonstances de lieu et de temps.

L’imprévisibilité n’est pas entendue de manière absolue mais relative, l’évènement doit être raisonnablement inattendu.

En effet, si l’évènement engendre un « effet de surprise » en raison de son anormalité, de sa soudaineté ou de sa rareté, il n’a pas à être totalement inconcevable pour caractériser un cas de force majeure.

Au contraire, la réalisation d’un évènement suffisamment probable ne sera pas susceptible de faire jouer la force majeure. Par exemple, les chutes de neige et le verglas en hiver sont prévisibles.

La Cour de cassation indique que l’imprévisibilité de l’évènement s’apprécie au jour de la conclusion du contrat, date à laquelle le débiteur s’est engagé en fonction de ce qui était prévisible. (Cass. com. 03/10/1989)
 

Un évènement irrésistible

 
« Un évènement dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées ».

Deuxième critère de la force majeure, l’irrésistibilité correspond à l’impossibilité absolue pour le débiteur d’exécuter son obligation, celui-ci n’a pas pu agir autrement.

Attention : l’exécution de l’obligation ne doit pas être rendue seulement plus difficile pour le débiteur, l’exécution doit être totalement impossible.

En fait, dans le Code civil, l’irrésistibilité de l’évènement s’entend tant dans sa survenance inévitable que dans ses effets insurmontables. Ex : une catastrophe naturelle ou une guerre.
 
Dans leur jurisprudence constante, la Cour de cassation et la Cour de justice de l’UE se livrent à une appréciation in concreto de l’irrésistibilité en recherchant si le débiteur aurait pu surmonter les conséquences néfastes qui ont nui à l’exécution du contrat.
 

Un évènement extérieur

 
Dernier critère de la force majeure, le Code civil ne mentionne plus l’extériorité mais « un évènement qui échappe au contrôle du débiteur ».

Cette nuance n’est pas sans conséquence puisqu’elle permet d’élargir le champ de la force majeure au-delà des seuls évènements extérieurs et d’y faire entrer des évènements auxquels la personne du débiteur n’est pas totalement étrangère.

La maladie (ex : fièvre soudaine, malaise) est un évènement qui n’est pas extérieur au débiteur mais dont il n’a pas nécessairement la maîtrise. La maladie peut donc constituer un cas de force majeure. (Cass. ass. plé. 14/04/2006)

Au contraire, dès que la personne du débiteur exerce une influence, de près ou de loin, sur la réalisation de l’évènement, la force majeure n’a plus raison d’être. Ce sera le cas si tu es tombé malade après une heure de footing sous la pluie, torse nu et en tongs chaussettes. Tu l’avais bien cherché ! 😆

Remarque La grève peut constituer un évènement extérieur et donc un cas de de force majeure pour l’employeur dès lors qu’elle n’est pas due à son fait. (Cass. 1ère civ. 24/01/1995)

En résumé, le requérant qui envisagerait de soulever un cas de force majeure devra prouver les caractères irrésistible, imprévisible et « extérieur » de l’évènement laissés à l’appréciation souveraine du juge.

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3. Les effets de la force majeure

 
Quels sont les effets de la force majeure ? 🤔
 
La force majeure est un moyen de défense invocable uniquement par le débiteur qui lui permet de s’exonérer de sa responsabilité lorsqu’il est empêché d’exécuter son obligation.

 

Plus précisément, l’article 1218 du Code civil distingue les effets de la force majeure selon que l’empêchement est temporaire ou définitif.

En effet, lorsque l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est simplement suspendue pendant la période d’impossibilité, à moins que le retard qui en résulte ne justifie la résolution du contrat.

À cet égard, la Cour de cassation avait jugé que : « en cas d’impossibilité momentanée d’exécution d’une obligation, le débiteur n’est pas libéré, cette exécution étant seulement suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat ». (Cass. 1ère civ. 24/02/1981)
 
Si l’on reprend l’exemple de la maladie (ex : fièvre, malaise), l’impossibilité pour le débiteur d’exécuter son obligation est seulement temporaire.
 
Dans l’attente que cet évènement constitutif d’un cas de force majeure prenne fin, le débiteur n’encourt pas la nullité du contrat qui est simplement suspendu, sous réserve qu’une exécution tardive présente encore un intérêt pour le créancier. (Cass. 3ème civ. 22/02/2006)
 
Au contraire, lorsque l’empêchement est définitif, l’exécution de l’obligation ne peut avoir lieu et le contrat est résolu de plein droit comme s’il n’avait jamais existé.
 
Le débiteur est ainsi libéré de ses obligations contractuelles dans les conditions prévues à l’article 1351 du Code civil. Le débiteur est exonéré de sa responsabilité contractuelle et le créancier ne peut donc pas lui réclamer de dommages-intérêts.
 

Attention : les dispositions relatives à la force majeure n’étant pas d’ordre public, les parties peuvent convenir d’y déroger conventionnellement, au moyen d’une « clause de force majeure », sous réserve que les stipulations n’aboutissent pas à une clause abusive.

Dans cette hypothèse, le débiteur de l’obligation supporte les risques de la force majeure et s’engage à poursuivre l’exécution du contrat en dépit de l’empêchement définitif.

4. Force majeure et Covid-19

 
Le Covid-19 constitue-t-il un cas de force majeure susceptible d’exonérer les contractants de leur responsabilité ? 😯
 
Cela ne t’a sans doute pas échappé, toute l’année 2020 (et plus si affinité) a été marquée par l’épidémie de coronavirus, un évènement enrayant tes relations sociales et bon nombre de relations contractuelles.

S’est posée la question de savoir si le Covid-19 relève ou non du cas de force majeure exonérant les contractants de leur responsabilité en cas d’inexécution de leurs obligations.

Une étude des décisions rendues dans le cadre d’autres épidémies révèle que les juges ont tendance à rejeter le cas de force majeure au motif que les maladies et leurs risques de transmission étaient soit connus, soit pas « suffisamment » mortelles. Ce fut le cas pour la grippe aviaire, la grippe H1N1, le virus Ebola, la dengue en Martinique et le Chikungunya sur l’île de la Réunion.

À l’inverse, une épidémie de brucellose a été retenue comme présentant les critères de la force majeure, la cour relevant que cette maladie était d’une « virulence inattendue » et de « contagion redoutable » associée à une « période d’incubation indécelable et imprévisible ». (Cour d’appel d’Agen, 21/01/1993)

S’agissant du Covid-19, l’étendue et la létalité du virus ainsi que les mesures contraignantes de prévention prises par la plupart des États laissent croire au cas de force majeure. Plusieurs juridictions se sont même prononcées en ce sens. (TC Paris, 20/05/2020)

En réalité, aucun arrêt n’a encore vocation à s’appliquer erga omnes pour guider les contractants. La caractérisation d’une force majeure en cas d’inexécution dépendra principalement des stipulations au contrat, du contexte commercial et de l’impact réel de l’épidémie sur la partie invoquant la force majeure.

Le cas des nouveaux contrats sera plus facilement tranché ; depuis plusieurs mois le caractère imprévisible de la pandémie fait nécessairement défaut. Il va falloir apprendre à vivre juridiquement avec le Covid-19 et ses mutants, les parties doivent désormais intégrer ce risque à leurs prévisions contractuelles.

Une difficulté demeure : à partir de quel moment les effets du Covid-19 sont-ils devenus prévisibles au contrat ? Faut-il plutôt s’aligner sur la déclaration de l’OMS ou sur la date des premières mesures de confinement ? La réponse reste en suspens.

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