Article 1240 du Code civil : responsabilité du fait personnel

Article 1240 du Code civil : responsabilité du fait personnel

article 1240 du code civil

La responsabilité du fait personnel est issue de l’article 1240 du Code civil qui dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Autrement dit, la responsabilité du fait personnel correspond à l’obligation pour l’auteur d’une faute dommageable de procéder à la réparation du préjudice subi par la victime.

Mais qu’est-ce qu’une faute ? À quelles conditions la responsabilité civile est-elle mise en œuvre ? Comment obtenir réparation de son préjudice ?

Toutes les réponses à ces interrogations se trouvent dans l’article, bonne lecture ! 😉

Sommaire

1. La responsabilité du fait personnel : définition

 
La responsabilité civile vise à réparer un dommage causé à un individu 💥
 
En droit français, on oppose classiquement responsabilité civile contractuelle et responsabilité civile délictuelle (ou extracontractuelle depuis la réforme de 2016).
 

La responsabilité civile contractuelle


Fondée sur l’article 1231-1 du Code civil, la responsabilité civile contractuelle est mise en œuvre dans le cadre de l’exécution d’un contrat.

Une partie au contrat subit un préjudice en raison de l’inexécution d’une obligation contractuelle à la charge de son cocontractant et ce dernier, en tant qu’auteur de ce manquement, doit indemniser le préjudice de la victime.
Exemples : le locataire ne paie pas son loyer, le livreur délivre un bien abîmé au client, etc.
 

La responsabilité civile délictuelle

Fondée sur les articles 1240 et 1241 du Code civil (article 1382 avant la réforme), la responsabilité civile délictuelle suppose qu’une personne ait causé un dommage à autrui en raison d’un acte juridique, volontaire ou involontaire.

La responsabilité civile délictuelle se décompose entre :

• La responsabilité du fait personnel : le droit commun de la responsabilité, le débiteur de l’obligation de réparation est, tout à la fois, l’auteur et le responsable du dommage. La responsabilité qui nous intéresse aujourd’hui.

• La responsabilité du fait d’autrui : lorsqu’on est responsable des faits commis par une autre personne. Par exemple, les parents envers les actes de leurs enfants. (Article 1242 du Code civil)

• La responsabilité du fait des choses : si un dommage est causé par une chose, le gardien de celle-ci est désigné responsable du préjudice. (Articles 1242 à 1244 du Code civil)
 
Depuis un arrêt du 11 janvier 1922, la chambre civile Cour de cassation a posé le principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle.
 
Selon le principe du non-cumul encore qualifié de non-option, si un dommage se rattache à l’exécution d’un contrat, il n’est pas possible d’en demander la réparation sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

2. Les conditions de la responsabilité civile

 
Pour être mise en œuvre, la responsabilité du fait personnel requiert un fait générateur, un préjudice et un lien de causalité.

 

Un fait générateur : la faute

 
Le fait générateur, autrement appelé « faute » est le comportement illicite d’un individu.

La faute peut aussi bien être volontaire qu’involontaire (article 1240 du Code civil). La faute peut également résulter d’une imprudence ou d’une négligence (article 1241 du Code civil).
 

En effet, la faute civile ne requiert aucun élément intentionnel, c’est une notion objective, on peut être fautif sans avoir conscience de la portée de son acte.

C’est pourquoi, même un enfant s’il est l’auteur du dommage, peut engager sa responsabilité civile sur le fondement de l’article 1240 du Code civil, la minorité ne faisant pas obstacle à une condamnation personnelle.

(Cass. 2ème civ. 20/10/2016)

N’étant définie par aucun texte, les juges se livrent à une appréciation de la faute au cas par cas, ils se basent sur les notions d’écart de conduite, de violation d’une règle ou d’abus de droit.

En principe, la faute peut consister en :

• Un acte positif : un comportement contrariant une norme juridique impérative.

• Une abstention : l’absence de conformité du comportement à celui normalement attendu, en référence à l’homme raisonnable placé dans les mêmes circonstances de fait et exerçant une même activité. Par exemple, le notaire qui n’informerait pas ses clients sur les points importants de l’opération qu’ils souhaitent réaliser.
 

Un préjudice : le dommage

 
Le préjudice correspond aux dommages subis par la victime et qui offrent droit à réparation.
 
Ce préjudice doit être réel (un dommage incontestable) direct et personnel (seule la victime peut obtenir réparation) et certain (un dommage doit être établi et évaluable).
 

En droit français, plusieurs types de dommages ouvrent droit à indemnisation :

• Le préjudice corporel : une atteinte à l’intégrité physique ou mentale de la victime qui entraine des blessures voire le décès. Ex : une côte fêlée dans un accident de la circulation
 
• Le préjudice matériel : une atteinte au patrimoine de la victime qui lui cause des pertes matérielles (atteinte aux biens) ou économiques (privation de rémunération).

Le dommage matériel englobe plus largement le gain manqué et la perte éprouvée par la victime en raison de la faute.

• Le préjudice moral : une atteinte psychologique impactant le bien-être psychique de la victime, c’est-à-dire, ses sentiments, son honneur ou sa réputation. Il peut être la conséquence de propos diffamatoires, d’injures ou directement d’un préjudice corporel.

• La perte de chance : c’est la disparition d’une éventualité favorable, d’une occasion de tenter quelque chose. Par exemple, une personne tombe dans les escaliers à cause d’un croche pied et se casse la jambe.
 
En plus des dommages corporels (blessures) et moraux (traumatisme), la victime subit une perte de chance si elle s’apprêtait à passer un examen universitaire déterminant pour son avenir. Le fait qu’elle soit privée de l’occasion de tenter l’épreuve augmente son préjudice.
• Le préjudice par ricochet : une atteinte subie par un tiers en raison du préjudice corporel, matériel ou moral dont souffre la victime principale.

Ex : l’auteur d’un accident de la circulation ayant causé la mort d’un enfant doit indemniser les parents de celui-ci.

Outre ces préjudices principaux, un dommage peut également être la cause d’un préjudice esthétique, préjudice sexuel, préjudice d’établissement ou d’un préjudice d’agrément.

 

Le lien de causalité

 

Le lien de causalité est l’élément essentiel permettant d’établir la relation entre la faute et les dommages causés à la victime. Si aucune preuve ne permet d’établir que ce trouble est issu de cette faute, alors la responsabilité civile de son auteur ne peut pas être engagée.

La Cour de cassation admet 2 théories de la causalité :

• L’équivalence des conditions : la Cour retient que toutes les causes, directes ou indirectes, qui ont concouru à la réalisation du dommage.

• La causalité adéquate : la Cour ne retient que la cause prépondérante comme fait générateur.
 
En principe, la Cour de cassation opte alternativement entre l’équivalence des conditions en matière de responsabilité pour faute et la causalité adéquate en matière de responsabilité sans faute, au sens de l’article 1240 du Code civil.

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3. Les exonérations de la responsabilité civile

 

En droit de la responsabilité civile, on parle d’exonération lorsqu’une personne échappe totalement ou partiellement à la responsabilité qu’elle aurait normalement dû encourir.

En effet, l’auteur du dommage peut démontrer qu’un fait extérieur a été la cause du dommage, et peut ainsi s’exonérer de sa responsabilité. Il détruit ainsi le lien de causalité entre la faute et le dommage qu’on lui reproche.
 

Les faits justificatifs

 

Le fait justificatif est une cause objective d’irresponsabilité qui neutralise le caractère illicite de la faute commise par l’agent. Puisqu’il n’y a plus de faute, il n’y a plus de fait générateur et la responsabilité de l’auteur ne peut pas être engagée.

La majorité des faits justificatifs appliquée en matière civile est tirée de la matière pénale. Ainsi, la jurisprudence a défini :
 

• L’ordre ou la permission de la loi : Lorsque la loi prescrit aux agents une conduite délictuelle, aucune faute ne saurait être reprochée à celui qui s’est conformé à cette injonction. Ex : le médecin qui rédige une déclaration de maladie contagieuse n’est pas coupable de violation du secret professionnel car la loi l’y oblige, en vertu de l’article 226-13 du Code pénal.

• Le commandement de l’autorité légitime : L’ordre donné par un supérieur hiérarchique est une cause de justification au même titre que l’ordre provenant directement de la loi. Toutefois, cette exonération ne vaut plus si l’ordre exécuté était manifestement illégal. Ex : un crime contre l’humanité.

• L’état de nécessité : la situation de la personne pour laquelle le seul moyen d’éviter un mal est d’en causer un autre de moindre gravité.

Ex : Le conducteur d’un camion se déporte sur la chaussée détruit une clôture pour éviter de renverser un piéton.

• La légitime défense : cela revient à commettre une faute pour protéger sa propre intégrité. Ex : une personne est agressée et blesse son agresseur en se défendant.
 
D’autres faits justificatifs sont uniquement issus de la jurisprudence de la Cour de cassation :
 
• Le consentement de la victime : la victime sollicite une atteinte et renonce volontairement au droit de demander réparation du dommage causé. (Cass. 3ème civ. 01/10/1975)
Ex : l’amputation d’un membre de la victime dans le cadre d’une opération chirurgicale.
 
• L’acceptation des risques : la victime accepte de s’exposer à l’éventualité de subir un dommage qui pourrait lui être causé accidentellement par un tiers. Ex : la participation de la victime à un match rugby ou la pratique d’arts martiaux.
 
Précisons que l’acception des risques et le consentement des risques ne constituent pas un fait justificatif autonome dans la mesure où ils ne font pas disparaître la faute.
 

Les causes étrangères

 

Le défendeur dont la responsabilité est engagée dispose de 2 leviers supplémentaires pour échapper à l’obligation de réparer le dommage.

• La force majeure : un évènement exceptionnel (cyclone, attentat) qui a conduit irrémédiablement l’auteur à commettre une faute. En tant que cause d’exonération totale de responsabilité, la force majeure répond à l’adage « à l’impossible nul n’est tenu ». Pour être qualifié de force majeure, l’évènement doit être imprévisibleirrésistible et extérieur à l’auteur de la faute.
 
• La faute de la victime : l’auteur du dommage peut être exonéré partiellement s’il rapporte que la victime a concouru à la réalisation de son propre préjudice. Le comportement de la victime est apprécié par les juges sans qu’il soit tenu compte du discernement de la victime, même s’il s’agit d’un enfant.
 
La Cour de cassation maintient une jurisprudence très stricte à ce sujet avec l’arrêt « Lemaire » et l’arrêt « Derguini » du 9 mai 1984.

4. L’action en réparation de l’article 1240 du Code civil

 

L’action en réparation au titre de l’article 1240 du Code civil obéit à l’adage juridique suivant : « Ne sera réparé que le préjudice, tout le préjudice et rien que le préjudice ».

Cette action a une fonction compensatoire, l’idée est de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit. Ce droit est un principe à valeur constitutionnelle, au sommet de la pyramide de Kelsen.

• La réparation en nature : c’est le modèle idéal de réparation s’agissant des dommages matériels puisqu’il permet de remettre la chose dans son état d’origine.
 
Ex : restitution de la tondeuse à gazon que l’on t’avait volée. (Oui le vol de tondeuse est un véritable fléau !) Néanmoins, cette forme de réparation n’est pas possible à l’égard des dommages corporels et des dommages moraux. La victime peut alors opter pour une indemnisation en argent.
 
• La réparation pécuniaire : l’allocation de dommages-intérêts est la forme de réparation la plus courante. Il s’agit d’une compensation financière calculée en fonction de la gravité du trouble subi.
 
Le juge prend en compte les conséquences physiques et morales du dommage, les frais assumés par la victime et les pertes financières qui en découlent.
 
Par exemple, pour les dommages corporels, la réparation peut supposer la prise en charge des frais médicaux, l’indemnité pour incapacité physique et l’indemnité pour perte de salaires, etc.
 
Dans un cas comme dans l’autre, l’action en responsabilité nécessite que la victime apporte la preuve de la faute, de son préjudice et du lien de causalité, cette étape est indispensable.
 
La demande présentée au tribunal est destinée à indemniser l’ensemble des troubles dont la victime a souffert. C’est crucial parce que le juge ne peut pas condamner l’auteur des dommages à verser un montant supérieur à la demande. On dit que le juge ne peut pas statuer « ultra petita ».

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